Gaillard Georges

Publié le par Roger Cousin

Gaillard GeorgesGeorges, Philippe, François Gaillard, né à Bougie (Algérie) le 26 janvier 1877, mort à Grasse (Alpes-Maritimes) le 22 novembre 1953, est un préfet et homme de lettres français qui fut également industriel et officier du 2e bureau durant la Première Guerre mondiale. Georges Gaillard descend d'un magistrat lyonnais qui fut un Républicain déporté en Algérie pour avoir soutenu la révolte des canuts de Lyon lors de leur insurrection contre le régime de Louis-Philippe. Ayant fait souche en Algérie, les Gaillard comptèrent parmi les familles importantes, apparentés aux Borgeaud et à Rocas, premier maire d'Alger. On y trouve principalement des juristes, avocats, avoués, un conservateur des hypothèques, etc.

Paul Gaillard, père de Georges, fut avocat et bâtonnier permanent du barreau de Constantine. Esprit humaniste et éclairé, il luttait pour la liberté de conscience et le pluralisme religieux, recevant à sa table alternativement l'évêque et le grand rabbin. Les trois frères de Georges Gaillard, tous engagés volontaires en 1914 se distinguèrent durant la guerre : le docteur Marcel Gaillard, mort pour la France fut décoré de la Légion d'honneur à titre posthume ; Maurice Gaillard, avocat à la cour d'appel d'Alger, président de la Société des médaillés militaires d'Alger et époux de la romancière Lucienne Favre, fut grièvement blésé aux Dardanelles et fait chevalier de la Légion d'honneur (trois citations) ; le médecin général Raoul Gaillard, grièvement blessé sur la Somme fut élevé au grade de commandeur de la Légion d'honneur (cinq citations). Georges Gaillard fit ses études à Paris où il obtint sa licence puis son doctorat de droit. Plus jeune avocat de France au barreau d'Alger, il abandonna rapidement cette profession après avoir dû assister son client arabe condamné à la peine capitale, peine à laquelle il était opposé. Il s'engage alors dans l'administration préfectorale puis fut chef de cabinet du ministre de la Marine.

Après avoir épousé en première noce l'héritière des Laminoirs Tréfileries de Lens, il quitte la préfectorale pour prendre la tête de cette entreprise. Il lui donna un nouveau souffle et s'investit également dans d'autres entreprises. Parallèlement en tant que militant radical-socialiste, opposé à la droite anti-dreyfusarde et admirateur de Jaurès, il développa une activité sociale importante et pionnière notamment dans son usine de Lens, ce qui lui valut une motion de félicitation de la Commission internationale du Travail. Engagé volontaire comme ses frères en 1914, il accomplit d'importantes missions périlleuses comme officier du 2e bureau. Sous le couvert d'une mission du ministre du Commerce auprès du royaume des Pays-Bas il fut sous-chef du 2e bureau à La Haye, en liaison avec l'Intelligence Service à Folkestone. Blessé en territoire ennemi, il demande néanmoins à être réinvesti aussitôt. Il est missionné par le maréchal Joffre pour rechercher et reconduire personnellement des éléments de troupe encerclés dans la forêt des Ardennes après la bataille de Charleroi. À cette occasion, parmi les 622 Français qu’il parvient à faire évader, il ramène en Hollande un capitaine grièvement blessé qui est le futur général Giraud.

À la demande du ministère des Affaires étrangères, il écrivait des articles sous le couvert de l'anonymat dans les journaux français pour dénoncer les exactions allemandes en Belgique dont il était informé par ses missions. Il était officiellement correspondant de plusieurs journaux. Dans le cadre de ses missions pour le gouvernement français, il fut reçu à la Cour de Hollande en 1915 et participa accessoirement à l'organisation d'une soirée artistique au Théâtre royal de la Haye. La Reine de Hollande lui fit don en remerciement d'un précieux nécessaire de bureau. Entre 1916 et 1917, mandaté par Georges Clemenceau il est envoyé pour plusieurs missions secrètes en Espagne. Il négocie pour la Direction générale des fabrications d'artilleries du Ministre de la Guerre pour obtenir des accords entre le Comité des Forges de France, dont il est Délégué, et les métallurgistes espagnols pour des approvisionnements de métaux destinés à l'armée française, depuis la Hollande. Il accomplit également plusieurs missions spéciales du Ministre de la Marine en Espagne, en tant qu'administrateur de la Société des Chantiers du Sud-Ouest.

Ayant soutenu le capitaine Dreyfus lors de la célèbre affaire, il était lié à son frère, Mathieu Dreyfus. Durant la Deuxième Guerre mondiale, il recueille et cache dans sa propriété de campagne les enfants de la petite-fille de Mathieu Dreyfus (petite nièce de Dreyfus) pour les soustraire à la déportation. En raison de son lien ancien avec le général Giraud à qui il avait sauvé la vie, il est tuteur des enfants Giraud (petits-enfants du général) et parvient à empêcher à cette même époque, qu'ils soient emmenés en Allemagne. Après la guerre, en 1947, conscient des importants appuis que le général Giraud a dans l'armée, il travaille secrètement à une réconciliation De Gaulle-Giraud. Il intervient auprès du ministre André Malraux avec qui il est en termes cordiaux et à qui il adresse un mémoire complet sur l'entente franco-américaine et les rapports Giraud-Eisenhower-Roosevelt dans l'espoir d'aider à « l'œuvre de réconciliation et de rassemblement entreprise. »

Grand lettré, il eut aussi des activités dans la presse littéraire. Il était cousin de Nina de Callias (dite Nina de Villard), égérie des poètes du Parnasse et grande passion de Charles Cros qui lui dédia son « Coffret de santal » . Elle accueillit dans son salon les plus grands noms de l'Art et de la Littérature de la fin du XIXe siècle : Courbet, Verlaine, Rimbaud, Villiers de L'Isle-Adam, Leconte de Lisle, Théodore de Banville, Mallarmé, Heredia, Cézanne… Georges Gaillard était reçu enfant pendant ses vacances chez la mère de Nina de Callias (Ursule-Émilie Gaillard).

Il fréquenta de nombreuses personnalités du monde littéraire ou politique :

  • le révolutionnaire anti-stalinien Boris Souvarine,
  • André Maurois,
  • la romancière Colette chez qui il déjeunait,
  • Sacha Guitry,
  • Yves Mirande et était apparenté à l'architecte Auguste Perret.
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