Bonnard Abel

Publié le par Mémoires de Guerre

Abel Bonnard (prononcé [bonar]) est un écrivain, homme politique et poète français né le 19 décembre 1883 à Poitiers et mort le 31 mai 1968 à Madrid. Entré en littérature avec deux recueils de poèmes, Les Familiers et Les Royautés, il devient une figure des milieux mondains grâce à sa réputation d'homme d'esprit. Grand voyageur, auteur d'une vingtaine d'ouvrages, il connaît le succès grâce à En Chine — qui lui vaut le grand prix de littérature — et aux Modérés. Participant aussi à de nombreux journaux, il est élu à l'Académie française en 1932. Maurrassien, il évolue vers le fascisme dans les années 1930 et se rapproche du Parti populaire français de Jacques Doriot. Partisan d'un rapprochement franco-allemand, il devient, durant la Seconde Guerre mondiale, une figure de la collaboration avec l'occupant nazi. Nommé ministre de l'Éducation nationale en 1942, il fait partie des « ultras » et des derniers partisans du régime de Vichy qui se réfugient à Sigmaringen en 1944. À la Libération, condamné à la peine de mort par contumace, il est déchu de l'Académie française et s'exile en Espagne. Rejugé en 1960, il voit sa peine commuée mais choisit de se fixer à Madrid, où il meurt en 1968. Après sa mort, son œuvre tombe dans un certain oubli. Fils d'Ernest André Étienne Bonnard, directeur des prisons de la Vienne, et de son épouse Marie-Pauline Benielli, sans profession, il est corse par sa mère. Son père biologique est en réalité le comte Joseph Napoléon, dit Gégé, Primoli, homme du monde, par lequel il descend de Joseph et Lucien Bonaparte, frères de Napoléon. Bonnard évoque d'ailleurs, dans Le Palais Palmacamini, sa rencontre, en 1882, avec « une jeune femme qu'il aimait » : sa mère. Enfin, par sa tante maternelle, Barberine, il est le cousin germain du poète Pierre Bonardi.

Bonnard Abel
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Bonnard Abel

Il naît le 19 décembre 1883, à trois heures du matin, au 16, rue des Grandes-Écoles à Poitiers, après un accouchement difficile. Il reçoit les prénoms d'Abel, Jean, Désiré, mais d'après Olivier Mathieu, n'est pas baptisé. Il garde le souvenir de la maison familiale comme d'une « forteresse » ou d'une « arche », « pleine d'une vie plantureuse ». Proche et complice de sa mère, il mène une enfance « rêveuse, imaginative, traversée par les émotions discrètes et profondes de la province et de la nature ». Son père, a contrario, est un « garde-chiourme » qui exerce sur lui une « sévérité inutile ». Il s'ennuie lorsqu'il doit l'accompagner à la maison d'arrêt. Il rapportera dans son autobiographie L'Enfance les disputes fréquentes de ses parents. À quatre ans, il sait lire et écrire couramment, et commence d'apprendre grec et latin à six ans. Très jeune, il acquiert un varié et vaste savoir et commence un journal intime. Il fait de fréquents séjours chez ses tantes à Ajaccio et chez le comte Primoli à Rome. Ce dernier, lettré, photographe et amateur d'art, le « prend sous son aile ». Bonnard le moque dans son journal — malgré l'affection qu'il lui porte. Il nourrit déjà son dégoût pour la « médiocrité humaine ». Sa mère lui lit les classiques, Homère, Sophocle, Virgile, La Fontaine, Perrault et les frères Grimm, et lui raconte des légendes ; ce qui marquera, plus tard, sa vision « traditionnelle » du monde.

Il n'a guère d'amis de son âge ; devant les timbres exotiques, qu'il collectionne, il développe une vaste imagination et se prend à rêver de terres inconnues. Il se passionne surtout pour les bêtes, et les oiseaux en particulier. En février 1887, après une mutation du père, la famille doit déménager à Embrun. Elle s'installe villa Roman, rue des Deux Casernes. Le 5 août de la même année, il lui naît un demi-frère, fils d'Ernest et Pauline et prénommé Eugène Jefferson. En août 1893, les Bonnard quittent Embrun alors que le père est nommé au centre de détention d’Eysses, à Villeneuve-sur-Lot. On perd trace d'eux jusqu'en octobre.  Jusqu'à sa dixième année, il est éduqué par des maîtres particuliers. Le 1er octobre 1893, Abel Bonnard intègre enfin le collège du lycée de Marseille, comme boursier d'État. Il s'y sent « étranger », et, guère préparé à la vie sociale, est mis à l'écart par les autres enfants ; il souffre aussi de l'éloignement d'avec sa mère. Élève irrégulier et désinvolte, il obtient néanmoins des prix d'excellence en compositions française, latine et grecque et en histoire — mais est un cancre en mathématiques — et n'en est pas moins remarqué par ses professeurs. Il lit les provençaux Théodore Aubanel et Roumanille, mais aussi Goethe ou Maurras, et passe la plupart de son temps dans la bibliothèque du lycée et près du Vieux-Port. C'est à Marseille qu'il commence à écrire Les Familiers.

Il passe ses étés en Corse, où il parcourt l'île. Là, il conçoit l'idée d'écrire un Napoléon — projet qu'il poursuivra toute sa vie. Le 24 juillet 1900, il est reçu bachelier. Lauréat du concours général la même année, il quitte Marseille pour Paris et s'installe au 17, rue Greuze avec Pauline et Eugène. Il entre au lycée Henri-IV, puis en khâgne à Louis-le-Grand. En 1902, il présente le concours d'entrée à l'École normale (ENS) de la rue d'Ulm. Il échoue, avec la note de 23,75 sur 60 et classé 25e sur 214 candidats. Il néglige de le présenter à nouveau l'année suivante. Inscrit en Sorbonne, il obtient une licence en lettres — mention passable — en 1905. Ses rapports avec son demi-frère Eugène — qu'il appelait déjà « le raté » — se dégradent, alors que lui réussit ses études avec brio. Abel, déçu par l'esprit « sorbonnard », auquel il reproche de « méconnaître la beauté », préfère se consacrer à son œuvre en germe. Ne côtoyant pas les autres étudiants, il préfère s'isoler dans sa chambre et entretenir des relations épistolaires, notamment avec Paul Géraldy. Même s'il connaît beaucoup de monde, il ne fréquente guère qu'Émile Despax et Léo Larguier. Se partageant entre Paris et Rome, il est reçu par Jérôme Carcopino au palais Farnèse, logé par Primoli dans sa villa d'Ariccia et introduit par Ernest Dupuy dans le mondo. Il travaille alors à un recueil de Sérénades, qu'il abandonnera ; mais il livrera les fortes impressions de cette époque dans Rome. Entretemps, il devient élève de l’École du Louvre. 

En 1906, à 22 ans, il publie son premier recueil de vers, Les Familiers, composé au domaine de Fontlaure à Éguilles chez Joachim Gasquet et dédié à sa mère. Ayant reçu une forte promotion de François Coppée, il est couronné par le nouveau prix de poésie de l'Académie française. D'aucuns prétendent alors qu'Edmond Rostand se serait fortement inspiré de l'ouvrage de Bonnard pour écrire Chantecler, ce qui provoque la polémique. À l'invitation de Coppée, il découvre Venise. Il visite la place Saint-Marc avec la princesse Bibesco. Coppée, au contact duquel il se sent « près de l'ancienne France », devient son maître quelque temps, jusqu'à sa mort en 1908. Parmi les symbolistes, il fréquente aussi Catulle Mendès, Sully Prudhomme et Jean Richepin. Dans le même temps, il découvre les salons de la comtesse Thérèse Murat, née Bianchi — qui sera, quinze ans plus tard, sa maîtresse — et de la marquise de Ludre-Frolois, où il rencontre le Tout-Paris. Il participe aussi aux « lundis hebdomadaires de la rue des Vignes » chez René Boylesve. Il séjourne cependant toujours en Provence, où il fréquente le groupe de la revue Le Feu : Joseph d'Arbaud, son vieil ami Joachim Gasquet, Xavier de Magallon et Émile Sicard. Le 5 mai 1908, il fait partie du comité d'initiative du « groupe des  », dont font partie avec lui Henri Barbusse, Tristan Bernard, Francis de Croisset, Reynaldo Hahn, Gabriel de La Rochefoucauld ou Paul Reboux. Le second dîner, où il retrouve Pierre Mortier, a lieu le 5 juin 1909.

Entretemps, en 1908, écrit et publie coup sur coup deux autres volumes de poésie, Les Royautés et Les Histoires — lesquelles se constituent de deux contes en vers, La Sous-Préfète et Le Prince persan. En outre, Abel Bonnard, au long de sa carrière, usera aussi du vers libre, comme dans son Poème du débauché paru dans la presse en 1938. Les deux volumes sont présentés au prix Archon-Despérouses, dans le jury duquel siègent Paul Bourget et Maurice Barrès — avec lequel il entretient une antipathie tenace : ce sont Les Royautés qui l'obtiennent. Jean-Louis Vaudoyer dira d'une des pièces du recueil, Hercule et Prométhée, qu'elle constitue « l'un de ces chefs-d'œuvre à demi-ignorés de la poésie française ». Au tournant des années 1910, il commence à visiter l'Europe, avec l'Allemagne, l'Autriche et la Hongrie. Il vit quelque temps à Muhlbach, en Alsace. Il écrit dans Les Guêpes, journal maurrassien, et, dès 1912, entame une collaboration au Figaro'. C'est alors que se forme ce que Paul Morand et Henri de Régnier ont appelé la « petite bande » ou « club des Longues moustaches ». Le groupe se compose principalement de camarades de l'École du Louvre, dont Charles Du Bos, Auguste Gilbert de Voisins, Émile Henriot, Edmond Jaloux, Eugène Marsan, Francis de Miomandre et son proche ami Jean-Louis Vaudoyer. Celui-ci décrit Bonnard à cette époque comme « un garçon au très fin et sensible visage, et dont les regards prompts, actifs, brillaient sous un front qu'une mousse de cheveux presque immatérielle enveloppait d'écume dorée ».

Le groupe se réunit au Caffè Florian à Venise. Il loge chez les sorelle Zuliani, à côté du palais Venier. Dans la ville, Bonnard prend des cours de chinois avec un certain Tchou Kia Kien. Il y rencontre aussi Gabriele d'Annunzio, mais leurs relations ne sont que froidement courtoises.  Alors, pendant quelques années, il n'écrit plus. Mais il amasse des centaines de cahiers d'ébauche. Parmi ceux-ci, on dénombre des projets de romans d'aventures, de textes fantastiques ou de science-fiction, picaresques, policiers. Il multiplie aussi les ébauches d'autobiographies, de nouvelles et de portraits dans la veine des Caractères, et les notes sur tous les sujets. Mais surtout, il écrit des milliers de pages poétiques, parmi lesquels un Chant d'enthousiasme, un Hymne à soi-même et une Ode aux grands hommes. Il fait enfin paraître, en 1913, deux romans, Le Palais Palmacamini et La vie et l’amour, qualifiés de « préproustiens » par Mathieu, se déroulant en Italie et à Rome et dont les héros sont fortement inspirés de sa personne. À cette époque, dans l'immédiat avant-guerre, il traîne, avec Paul Géraldy et Pierre Mortier, à Montmartre, et notamment au cercle des artistes russes, et se tient à l'écart des mouvements « avant-gardistes » de l'époque.

Le 11 juillet 1914, il témoigne au procès de madame Caillaux. Mobilisé en 1914, il tient à jour durant la Première Guerre mondiale un manuscrit, qu'il intitule Caractère de la guerre. Journaliste littéraire, il est un ami de Marcel Proust. Il collabore à un recueil littéraire et poétique avec Colette et Paul Morand — Affaires de cœur — ainsi qu'au second tome d'un ouvrage — Les merveilles de la mer — où il succède à Paul Valéry. En 1920, il accompagne Paul Painlevé dans sa mission en Chine, avant de prolonger son séjour plusieurs mois. Chroniqueur, il écrit pour plusieurs journaux : Le Figaro, auquel il avait commencé de collaborer avant la Grande Guerre, Le Journal, Comœdia, le Journal des débats, ou encore Paris-Midi. D'un long voyage en Extrême-Orient, il tire de ses notes de voyage un ouvrage, En Chine, que l’Académie française couronne en 1924. Il publie bien d'autres livres, sur la littérature, les civilisations, la philosophie : La Vie amoureuse d’Henri Beyle, Saint François d’Assise, Au Maroc, Rome, L’Enfance, Éloge de l’ignorance, L’Argent, L’Amitié, etc. En 1928, il promet à Marie Gasquet, veuve de son ami Joachim, d'écrire Les belles fêtes, ce qu'il ne fera jamais. C'est aussi à cette période qu'il s'éloigne de beaucoup de ses anciens amis, notamment de Pierre Mortier. Il s'adjoint les services de son frère comme secrétaire39. En 1929 est publié son Saint François d'Assise.

Bonnard Abel
Bonnard Abel

Le début des années 1930 est pour lui l'occasion d'une intense activité artistique : il visite beaucoup d'expositions et s'adonne au dessin. De là, il tire des articles de critique d'art et puise de l'inspiration pour écrire Rome — publié en 1931. C'est alors qu'il se brouille avec Bergson. Le 11 juin de la même année, candidat à l'Académie française, il échoue contre Pierre Benoit alors que son ami Jules Cambon, malade, n'a pas pu prendre part au vote. Mais, un an après, le 16 juin 1932, il est élu membre de l'Académie au fauteuil de Charles Le Goffic en s'imposant largement face à Francis de Croisset, René Pinon, Alfred Poizat et Jérôme Tharaud, Son talent d'écrivain, mais aussi son entregent, son activité mondaine et ses dons de « causeur » expliquent son élection. Le 16 mars 1933, en présence d'un public densé et composé de « longues moustaches », il est reçu, « non sans quelques flèches discrètes » par le cardinal Baudrillart, après que ses amis, au premier titre desquels l'amiral Lacaze, lui eurent remis son épée au cours d'une brève cérémonie au siège du Journal des débats. Il devient l'un des trois plus jeunes académiciens. Il déclare alors à un journaliste qu'il regrette de n'avoir plus le temps de voyager, qu'il aimerait entreprendre un nouveau périple en Asie, et que son prochain ouvrage sera le Napoléon qu'il prépare de longue date. Abel Bonnard, selon Olivier Mathieu, est « désormais, en France, l'un des chroniqueurs les plus lus, sinon l'un des plus appréciés, et, à « droite », l'un des plus écoutés, sinon l'un des mieux compris ». Il est, « avec Céline, Giraudoux et Margaret Mitchell, l'un des quatre écrivains vivants qui suscitent le plus grand enthousiasme ». Mais il est aussi le nègre de plusieurs auteurs : toujours d'après Mathieu, il est ainsi l'auteur de la moitié du Turenne du général Weygand

Très tôt, il a des contacts parmi les hommes politiques : Léon Bérard, Maurice Paléologue, André Tardieu ou Weygand, comme son ami André Delacour, lui font des confidences et lui donnent des informations ; il les rassemble dans son journal sous le titre Choses sues. Jules Cambon lui insuffle le goût politique. Revenu des longs voyages, il se cantonne cette fois-ci à l'Europe, et notamment à l'Espagne, d'où il ramène Navarre et Vieille-Castille, à la Yougoslavie, à Venise et à Bruxelles, où il représente l'Académie. Il se fait connaître des milieux politiques nationalistes à partir de 1925 par sa collaboration au quotidien de Georges Valois, Le Nouveau Siècle, puis au Courrier royal avec Henry Bordeaux et Georges Bernanos. Proche de l'Action française, sa pensée politique est celle d'un nationalisme maurrassien, antiparlementariste. Il préside en novembre 1933 l'ouverture des cours de l'institut d'Action française, aux côtés de Maurras. C'est un habitué des dîners des « Affinités françaises », qu'il préside à plusieurs reprises — une conférence de René Gillouin en 1930, de Pierre Gaxotte en 1932, et une avec Claude-Joseph Gignoux et Jacques Le Roy Ladurie en 1934 — et où il valorise le rôle des élites, un thème qui lui est cher,. Il assiste à d'autres dîners, par exemple en 1933, 1934 ou 1939. On le trouve aux banquets du cercle Fustel de Coulanges, proche de l'Action française, à des réunions de la Jeune Droite : il préside en février 1935 un dîner de La Revue du XXe siècle de Jean de Fabrègues, et participe à des réunions de la revue Combat, en juin et à l'automne 1936, : par exemple, une organisée par la revue en juin 1936 sur le thème « tradition et révolution », avec Gillouin, Brasillach et le critique d’art de Combat Jean Loisy, ou une autre sur « l'art d'État et l'art de classe ».

Le 24 août 1933, il déclare à Candide : « Quand la société se disloque, quand l'art politique est perdu, alors les artistes, placés au faîte de l'édifice, sont les guetteurs désignés pour avertir l'ensemble des hommes de tous les périls qui menacent aussi bien les activités les plus hautes que les plus modestes bonheurs. » Il est sceptique quant à l'action des ligues, en particulier lors de la crise du 6 février 1934 : il évoquera dans un discours en 1937 « ce touchant et misérable six février, cette ébauche d'un tableau qui n'a pas été peint, d'une œuvre qui n'a pas été faite ». La victoire du Front populaire en 1936 le pousse à publier ce qui est son œuvre politique majeure, Les Modérés, qui critique les parlementaires ainsi que la démocratie. Il rejoint des personnalités « nationales » comme René Gillouin et Gaston Le Provost de Launay au comité directeur du Rassemblement national pour la reconstruction de la France (1936-1937), aux côtés du général Maxime Weygand ou Bernard Faÿ notamment, qu'il a pu côtoyer aux « Affinités françaises ». En février 1936, il suit la dépouille mortelle de Jacques Bainville. En juin 1936, il préside un meeting nationaliste qui, avec comme orateurs Louis Darquier de Pellepoix et Henri Massis, célèbre l'action antibelliciste de Maurras et Thierry Maulnier, et y préconise la « Révolution nationale ». On le trouve encore aux côtés de Maurras, à un dîner de « L'Œillet blanc » — cercle aristocratique royaliste — en 1936 et comme président d'une conférence de Bernard Faÿ donnée en 1939 sous les auspices de ce cercle. Il se rapproche du Parti populaire français (PPF) de Jacques Doriot, et préside ses « cercles populaires français » en 1937, participe à des meetings. Il préside en 1937 une conférence de Doriot donnée au Cercle des chambres syndicales patronales, ce qui donne l'occasion à la gauche de moquer le prétendu caractère « populaire » du PPF.

Il ne rompt pas pour autant avec les milieux d'Action française et les autres cercles « nationaux ». C'est alors que le PPF prône alors l'union des « nationaux », avec notamment la création du Front de la liberté (FL). Il devient en 1936 membre du comité d'honneur du cercle Jacques Bainville de Paris, aux côtés de Maurras et Léon Daudet notamment. Il prend la parole en juillet 1937 au meeting organisé au Vélodrome d'hiver pour célébrer la sortie de prison de Charles Maurras, comme d'autres personnalités du monde des « nationaux ». Maurras mérite alors selon lui « la gratitude et l'amour de tous les Français ». En 1939, on le trouve encore à la table d’honneur lors d’une réunion organisée par Charles Trochu salle Wagram pour célébrer l’élection de Maurras à l’Académie française, en présence du « maître » et aux côtés de Le Provost de Launay, Henry Lémery, Gillouin, Georges Claude, Firmin Roz, etc.. En outre, il préside une réunion du cercle Fustel de Coulanges, aux côtés de Maurras, au cours de laquelle les orateurs montrent « avec une vigueur vengeresse, la fausseté de quelques-unes des légendes à la gloire de la Révolution », dans le contexte du 150e anniversaire de la Révolution française : une réunion « nécessaire pour sauver l'honneur de l'esprit français devant une glorification frauduleuse » selon Bonnard, qui affirme : « Il faut sauver la France des suites chaque jour plus néfastes de la Révolution. [...] Nous voulons revenir, tenant compte des conjonctures nouvelles, à la France d'amitié d'avant 1789. ». Il prend position contre le racisme dans un article du Journal des débats du 11 avril 1933 intitulé « Les esprits libres » ; en outre, il fait élire Maurice Paléologue à l'Académie et attribuer le grand prix de littérature à André Suarès, et Les Modérés reçoivent les louanges de personnalités juives comme Henry Bernstein, André Maurois, Henri Bergson. Néanmoins, il prend des notes sur le racisme et la question juive en 1937, qui ne seront publiées qu'un demi-siècle plus tard et qui montrent son évolution vers l'antisémitisme — évolution qui lui vaut les attaques de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICA).

Ce futur ministre de l'Éducation est convaincu qu'il n'est « pas bon de répandre aveuglement l'instruction » et qu'elle doit être réservée à une élite. Il exprime souvent cette idée dans ses conférences et ses écrits, depuis son Éloge de l'ignorance en 1926 — un pamphlet contre l'école unique voulue par le Cartel des gauches —, notamment dans les cercles « nationaux » qui partagent ses convictions réactionnaires sur ce sujet, comme le cercle Fustel de Coulanges. Selon lui, l'instruction n'est bonne ni pour les femmes, ni pour le peuple. Bonnard fait l'apologie de l'instinct, de l'élitisme, de la sélection, du bon sens populaire. Il figure au comité de patronage de la Ligue de l'éducation française, lancée en 1936. En 1935, il signe le Manifeste pour la défense de l’Occident et la paix en Europe. Il soutient l'Espagne du général Franco et préside une réunion de L'Ordre national « en hommage à l'Espagne nouvelle ». Proche ensuite du comité France-Allemagne, il voyage en Allemagne en 1937 ; le quotidien Le Journal publie ses impressions et ses interviews d'Adolf Hitler et du théoricien nazi Alfred Rosenberg. La presse nazie souligne ses prises de position en faveur du rapprochement franco-allemand. Ainsi, il sympathise avec Otto Abetz et Ernst Jünger et, le 21 janvier 1938, il reçoit Leni Riefenstahl à Cherbourg. C'est vers cette période qu'il rompt avec ses amis juifs, notamment Bernstein et Maurois. En 1939, représentant l'Académie à l'occasion du tricentenaire de la naissance de Racine, il rencontre António de Oliveira Salazar, chef de l'Estado Novo, à Lisbonne. Après que la guerre éclate, il prononce encore une conférence, le 26 janvier 1940 ; il est aussi en contact Louis Thomas, futur collaborateur.

Il est davantage collaborationniste que maréchaliste sous l'Occupation : membre d'honneur du Groupe Collaboration, il prône « une vision musclée de la Révolution nationale ». Il écrit dans Aujourd'hui, Le Cri du peuple, France-Japon, La Gerbe et Le Matin. Dans La Nouvelle Revue française de mars 1941, il dit sa réjouissance d'être « délivré » de l'Europe des Lumières ; auteur d'éditoriaux dans Je suis partout, il se fend notamment d'un article intitulé « Les réactionnaires », dans lequel il marque sa rupture avec le royalisme et l'antigermanisme de Maurras ; les deux hommes ne devaient plus se revoir. Avec Xavier de Magallon, il fréquente la fine fleur de la collaboration : Otto Abetz, Arno Breker, Hermann Bunjes, Werner Gerlach, Bernhard Payr, Rudolf Schleier, etc. ; il reçoit Ernst Jünger, qui voit en lui « l'un des derniers représentants d'une intelligence qui disparaît au monde ». Dans Les Décombres, Lucien Rebatet saluera « les articles vibrants et inspirés d'Abel Bonnard ». Son collaborationnisme exacerbé, et le soutien qui lui est apporté par Abetz, lui valent le surnom d'« Abetz Bonnard ». Le 24 janvier 1941, il est désigné par Vichy membre du Conseil national. La même année, il fait paraître ses Pensées dans l'action. Du 21 au 26 novembre 1941, il fait partie du célèbre groupe de sept écrivains français — lui, Robert Brasillach, Jacques Chardonne, Pierre Drieu la Rochelle, Ramon Fernandez, André Fraigneau et Marcel Jouhandeau — qui se rendent au congrès international de littérature à Weimar, où ils rencontrent Joseph Goebbels. Il y rencontre son ami John Knittel. Avec Brasillach et Drieu, il se recueille sur les tombes de Goethe et Schiller. Il y retourne dès 1942 avec, en sus, Georges Blond et André Thérive. Il soutient la formation de la Légion des volontaires français contre le bolchevisme (LVF) en juin 1941. En février 1942, il se réconcilie avec Pierre Bonardi, son cousin germain avec lequel il était brouillé depuis son enfance.

Le 18 avril 1942, il est appelé au gouvernement de Vichy par Pierre Laval qui le nomme ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse. Sa nomination est saluée dans La Gerbe et dans Je suis partout sous la plume de Robert Brasillach, mais moquée par Jean Guignebert au micro de la BBC. À l'hôtel de Rochechouart, siège du ministère, il s'installe dans le bureau de Jules Ferry. Son équipe ministérielle est composée principalement de René Georgin, directeur de cabinet, Jacques Bousquet, Pierre Couissin, Maurice Gaït, Serge Jeanner et Jean Mouraille, Marcel Giraudet, Jean-Alexis Néret, André Lavenir et Maurice Roy ; il a également Alfred Cortot comme conseiller technique, tandis que Marie Susini devient sa secrétaire particulière. Membre du gouvernement, il n'assiste plus aux séances de l'Académie, ni n'écrit dans les médias, si ce n'est dans La NRF dirigée par Drieu et au micro de Radio-Paris. Durant son passage au gouvernement, Bonnard est surtout connu du grand public pour sa réputation d'homosexuel, que lui-même entretient volontiers par ses allures de dandy, ou en s'affichant lors de sa prise de fonctions avec un jeune directeur de cabinet au physique avantageux. Malgré son attitude laudatrice en public, il n'apprécie guère le maréchal Pétain, qu'il décrit dans son journal comme « un brochet nageant dans l'eau bénite : les heures de lucidité du vieillard sont courtes comme les heures de lumière des jours d'hiver ». Il pousse à la coopération franco-allemande dans le domaine des échanges culturels et fait connaître ses positions anticléricales.

En juillet 1942, il inaugure la grande exposition consacrée à Arno Breker à l'Orangerie, puis entame une tournée des écoles primaires. Le 12 août, il entre au comité de la Légion tricolore. En octobre, il participe aux journées d'Interfrance, organisées par Dominique Sordet. Il multiplie également les décrets imposant le service du travail obligatoire (STO) aux étudiants, fonde, en novembre 1942, une chaire d'ethnologie et d'histoire du judaïsme à la Sorbonne, confiée à un antisémite, Henri Labroue, ainsi qu'un institut anthroposociologique. Il applique à la lettre les lois antisémites du régime français collaborateur en procédant à la révocation de tous les juifs en poste dans l'éducation nationale, et notamment de l'inspecteur général de l'instruction publique Jules Isaac, auteur des célèbres manuels scolaires d'histoire Malet et Isaac, en déclarant le 13 novembre 1942 : « Il n'était pas admissible que l'histoire de France soit enseignée aux jeunes Français par un Isaac. ». Le 16 décembre 1942, il est élu membre du conseil municipal de Paris, représentant le 16e arrondissement de Paris. Le 31 janvier 1943, il est l'un des fondateurs du Service d'ordre légionnaire (SOL), embryon de la Milice. Il révoque Simone de Beauvoir en juin 1943 pour « excitation de mineure à la débauchen », mais échoue à faire de même pour Sartre. Il porte la responsabilité d'avoir, dans l'été 1943, donné un ordre de mission à un certain Jean-François Lefranc de laisser revenir à Paris — donc de livrer à l'Occupant qui la convoitait de longue date — la précieuse collection (mise en caisses) de 333 tableaux anciens d'Adolphe Schloss, dont ce marchand d'art parisien avait été désigné « administrateur ». Transférée en 1939 de Paris au château corrézien de Chambon, la collection y fut localisée le 10 avril 1943, emballée en cinq ou six jours et dérobée par les hommes de main de la Gestapo.

Le 8 juin 1943, il est conspué au Quartier latin par un groupe de 200 étudiants en médecine. Le 6 novembre 1943, il se dispute violemment avec son frère Eugène, qui lui reproche sa politique « pro-allemande ». Le 3 juillet 1944, peu après l'exécution de Philippe Henriot, il fait partie de la vingtaine de signataires de la « note des ultras », qui réclament la « guerre sans merci ». L'Humanité clandestine s'attaque alors à ce « nazificateur brutal » et « académicien doriotiste » et appelle à se venger sur sa famille. Le 17 août 1944, avec Jean Bichelonne, Maurice Gabolde, Raymond Grasset et Paul Marion, il assiste à son dernier conseil des ministres. Il reste en poste jusqu'au 20 août, date à laquelle il quitte Paris. Malgré sa relative longévité à ce poste, son œuvre de ministre est mince mis à part ses actions antisémites, ce qui est paradoxal compte tenu de ses réflexions antérieures sur l'éducation. Le 21 août 1944, il retrouve Pétain à Belfort. Le 7 septembre, il part pour Sigmaringen. Arrivé à Sigmaringen avec Pauline Benielli, sa vieille mère, et son frère, il y retrouve les « ultras » de la collaboration, Fernand de Brinon, Marcel Déat, Jacques Doriot et Georges Oltramare, et les écrivains Céline et Rebatet. Le 25 février 1945, il assiste aux funérailles de Doriot. Céline est le dernier médecin de sa mère, qu'il évoque dans D'un château l'autre. Elle meurt le 4 mars 1945. Il signe son acte de décès, avant qu'elle ne soit inhumée au cimetière de Sigmaringen. 

Le 2 mai 1945, avec son frère, Maurice Gabolde et Jeanne et Pierre Laval il s'envole pour l'Espagne dans un avion prêté par le diplomate allemand Rudolf Rahn. Arrivé dans le pays sans passeport, il est incarcéré à la forteresse du château de Montjuïc — où il s'occupe en dessinant. Entretemps, il est mis à l'index par le comité national des écrivains pendant l'épuration. Le 4 juillet 1945, après un procès d'un quart d'heure marqué par le réquisitoire de l'avocat général Blanchet, il est condamné à mort par contumace pour « enrôlement pour l'Allemagne, intelligence avec l'ennemi, participation à une entreprise de démoralisation de l'armée et de la nation » et « atteinte à l'unité de la nation ». Se voyant retirer ses décorations et confisquer ses biens, il encourt la peine de dégradation nationale, laquelle entraîne, le 26 décembre, sa radiation par ordonnance de l'Académie française. Il partage ainsi le sort du maréchal Pétain et de Charles Maurras. Mais, contrairement à ces deux derniers, et comme Abel Hermant, il verra son fauteuil pourvu de son vivant : le 7 novembre 1946, élu face à Léon-Paul Fargue et Martin-Saint-René, Jules Romains lui succède. Finalement libéré le 17 janvier 1946, il séjourne dans un hôtel de Barcelone. Autorisé, le 28 avril, à circuler sur le territoire espagnol, il obtient l'asile politique, grâce à l'appui de José Félix de Lequerica. Eugène Bonnard meurt en août 1947. Après avoir rencontré une Alsacienne qui devient sa maîtresse, il gagne Salamanque, puis s'installe à Madrid, où il demeure une douzaine d'années.

Sombrant dans la misère, il change souvent de domicile. Il rencontre des personnalités espagnoles, ainsi Manolete, mort en 1947. Il retrouve aussi d'anciens collaborateurs, comme Josée de Chambrun, la fille de Laval, et Georges Guilbaud et sa jeune épouse Maud, qui le trouvera « irrésistible », et qu'il chargera de la documentation autour de l'étude sur Napoléon qu'il prépare de longue date, et les frères José Ignacio et Luis Escobar Kirkpatrick. En décembre 1951, il rencontre incidemment l'illustrateur Pierre Labrouche, coauteur avec lui de Navarre et Vieille-Castille. Tous les vendredis, jusqu'en 1957, il publie une chronique dans Madrid. Peu avant sa mort, il fréquente assidûment Amélie d'Orléans, ancienne reine du Portugal, qui aurait été sa dernière maîtresse. Le 4 mars 1958, alors que la Haute Cour de justice s'apprête à juger les derniers hauts responsables du régime de Vichy, à savoir Louis Darquier de Pellepoix, Maurice Gabolde, André Masson et lui-même, il annonce, seul des quatre et à la surprise générale, son intention de se présenter à son procès. Le 1er juillet 1958, accompagné de ses défenseurs, Jacques Martin-Sané et le bâtonnier Toulouse, il quitte Madrid pour Paris, où il se constitue prisonnier. Interpellé à l'aéroport du Bourget, il est conduit à la prison de Fresnes, où on lui signifie le mandat d'arrêt dont il fait l'objet ; incarcéré deux heures et demie, il est mis en liberté provisoire.

Il séjourne dans une maison de santé à Enghien, puis sur le boulevard Pereire et dans un hôtel à Passy. Au début de 1959, il rentre deux semaines à Madrid pour revenir immédiatement à Paris. C'est le 22 mars 1960, salle de Brosse au Sénat, que la Haute Cour siège dans une séance extraordinaire présidée par le député Jean de Broglie. Le jury est composé de sept députés et six sénateurs, et l'avocat général est Raymond Lindon. Parmi les témoins de la défense, on compte André Lavenir, ancien membre du cabinet de Bonnard, Alexandre Rauzy, ancien député de l'Ariège, et Pierre Taittinger. Dans le public, se trouve notamment Jacques Benoist-Méchin. Le magistrat instructeur, le conseiller Guy Raïssac, déclare dans son rapport qu'aucun des griefs retenus contre Bonnard n'est fondé. Interrogé, Bonnard ne renie pas son engagement passé ; il est applaudi dans le public. Le lendemain, second et dernier jour d'audience, l'avocat général Lindon dresse un violent réquisitoire contre lui. Me Toulouse souligne, lui, que Bonnard « n'avait rien à gagner dans cette aventure ». Après deux heures de délibération du jury, il est condamné à dix ans de bannissement avec sursis, avec effet à partir du 20 mai 1945 : la peine — symbolique — est donc déjà purgée. Il voit, en outre, sa dégradation nationale rapportée, et est déclaré fondé à « demander réparation de la saisie et de la vente de ses biens » à la Libération. Mais, à propos du terme « bannissement », il dit : « il me signifie, je le dis avec un profond regret, que ma place n'est plus dans la France d'aujourd'hui » ; n'acceptant donc pas cette « flétrissure morale », il retourne à Madrid quelques jours plus tard. 

Il fait encore paraître, en Belgique, deux plaquettes reprises d'anciens articles, et, après une visite de son directeur Raymond Bourgine en 1962, accepte d'écrire quelques articles dans Le Spectacle du Monde. À la fin de janvier 1962, il fait un ultime séjour à Paris. Il continue à vivre dans la pauvreté, et reçoit quelques subsides via Emmanuel Berl, Jacques Guérard et Paul Morand. Certains de ses anciens éditeurs lui versent des droits d'auteur, et la bibliothèque de Caen, qui acquiert une part de sa bibliothèque, l'indemnise. Parmi ses quelques plaisirs, on compte ses promenades nocturnes près du Jardin botanique royal, et ses visites au palais d'Orient, à la puerta de Alcalá et à la statue équestre de Philippe IV. Il dîne régulièrement avec Léon Degrelle, Claude Martin, Saint-Paulien et Otto Skorzeny, et reçoit des visites amicales de Jean-Marie Le Pen. Il donne des leçons de français dans certains quartiers de Madrid. Il s'intéresse à Degas, Gobineau, Leopardi. Malgré les sommes qu'on lui propose pour écrire ses Mémoires, il refuse ces offres. Cependant, en 1962, il rédige son Testament politique — resté à l'état de manuscrit. En août 1962, les derniers exemplaires de l'édition originale des Modérés disponibles chez Grasset sont mis au pilon. Au même moment, Roger Nimier propose à Bonnard de faire rééditer certains de ses livres ; mais il meurt dans un accident quelques semaines plus tard. Son dernier voyage hors d'Europe, Bonnard l'accomplit à Tenerife, dans les îles Canaries, en février 1964. Alors que, toujours à Madrid, il déménage dans le quartier de Prosperidad — chez Sara Paniego ; ce sera sa dernière demeure — il est terrassé par un infarctus. Il multiplie les problèmes de santé. Il écrit dans une lettre : « Je suis bien fatigué, et encore plus las que fatigué. La lassitude, c'est la fatigue de l'âme ». Il lit son « cher Fontenelle, le sage intact », et Cournot, « un grand esprit ».

Le 19 décembre 1967, il remercie un ami : « Votre bouquet m'arrive le jour anniversaire de celui où j'ai fait la maladresse de naître, qui va bientôt être réparée ». Le 6 avril 1968, il est admis à l'hôpital Jiménez Díaz pour une thrombose coronaire. Ayant refusé le « secours » de la religion chrétienne, l'un de ses ultimes propos est : « La parole est au chaos, et rien ne la lui ôtera plus » ; sur sa table, se trouvent le Coran et un livre de Schopenhauer. Âgé de 84 ans, il meurt « seul et abandonné », le 31 mai 1968 à 22 h 55. Ses obsèques, qui ont lieu le lundi de la Pentecôte 1968, se déroulent de manière quasi-confidentielle. Son acte de décès, signé par un simple employé des pompes funèbres, porte la mention « défunt de père et de mère inconnus ». Enterré au Sacramental de San Lorenzo y San José, à la concession numéro 136, sa tombe porte simplement : ABEL BONNARD MDCCCLXXXIII MCMLXVIII. Il a interdit, par testament, le rapatriement de ses cendres en France. Les livres d'Abel Bonnard, ses manuscrits — dont celui de son Napoléon — et ses archives sont dispersés et vendus. Bonnard désigne, dans son testament daté du 3 novembre 1964, Suzanne Roth-Matthis comme légataire universelle. Ses archives passent ensuite notamment dans les mains d'Enrique Pérez Comendador, Bernard et Marcel Laignoux, Christian Sarton du Jonchay, Jacques Guérard, Paul Morand et Maurice Gaït. La duchesse de Durcal aurait fait main basse sur la collection des articles parus dans Madrid. Après-guerre, Bonnard tombe dans un relatif oubli, son parcours ayant peu intéressé les historiens. Parmi les rares synthèses consacrées au personnage, on compte un article de Jacques Mièvre, publié en 1977 dans la Revue d'histoire de la Deuxième Guerre mondiale, et une biographie rédigée par Olivier Mathieu, un militant néo-nazi et négationniste, que Patrick Buisson qualifie de « panégyriste » de Bonnard. Dans la pièce radiophonique Terminus Sigmaringen de Louis-Charles Sirjacq, diffusée en 2006 sur France Culture, il apparaît avec la voix de Jacques Ciron. En 2014, un jeu en ligne sur le site de France 3, « Sauvons le Louvre », met en scène Abel Bonnard. Le nom d'Abel Bonnard est, de nos jours, principalement associé, non seulement à son image de collaborateur, mais à sa réputation d'homosexuel, qui lui a valu de son vivant le sobriquet de « la Belle Bonnard ». Cette image, conjuguée avec son soutien extrême au nazisme lui vaut également le surnom de « Gestapette » inventé par le chroniqueur Jean Galtier-Boissière et repris par Pétain. Bonnard semble avoir lui-même entretenu cette réputation, y compris durant son passage au gouvernement, par plaisir de choquer. 

Publications

  • Abel Bonnard, Les Familiers, Paris, Société française d'imprimerie et de librairie, 1906, 260 p. (notice BnF no FRBNF31840234)
  • Abel Bonnard, Les Royautés : poèmes, Paris, Fasquelle, 1908, 287 p. (notice BnF no FRBNF31840248)
  • Abel Bonnard, Les Histoires : La Sous-Préfète ; Le Prince persan, Paris, Fasquelle, 1908, 189 p. (notice BnF no FRBNF31840238)
  • Abel Bonnard, La Vie et l'Amour : roman, Paris, Fasquelle, 1913, 389 p. (notice BnF no FRBNF31840257)
  • Abel Bonnard, Le Palais Palmacamini, Paris, Fasquelle, 1914, 280 p. (notice BnF no FRBNF31840245)
  • Abel Bonnard (ill. François-Louis Schmied), La France et ses morts : poème, Paris, Société littéraire de France, 1919, 55 p. (notice BnF no FRBNF31840237)
  • Abel Bonnard, En Chine : 1920-1921, Paris, Fayard, 1924 (réimpr. 1931), 362 p. (notice BnF no FRBNF41626598)
  • Abel Bonnard, Éloge de l’ignorance, Paris, Hachette, coll. « Les Éloges », 1926, 61 p. (notice BnF no FRBNF31840230)
  • Abel Bonnard, La Vie amoureuse d'Henri Beyle (Stendhal), Paris, Flammarion, coll. « Leurs amours », 1926, 185 p. (notice BnF no FRBNF34150098)
  • Abel Bonnard (ill. Jean Berque), Au Maroc, Paris, Émile-Paul frères, coll. « Ceinture du monde », 1927, 97 p. (notice BnF no FRBNF31840215)
  • Abel Bonnard, L'Enfance, Paris, Le Divan, coll. « Les soirées du Divan », 1927, 74 p. (notice BnF no FRBNF31840233)
  • Abel Bonnard, L'Amitié, Paris, Hachette, 1928 (réimpr. 1991), 189 p. (notice BnF no FRBNF31840211)
  • Abel Bonnard, L'Argent, Paris, Hachette, coll. « Notes et maximes », 1928 (réimpr. 1992), 58 p. (notice BnF no FRBNF31840214)
  • Abel Bonnard, Le Solitaire du toit, Paris, Société du Livre d'art, 1928, 219 p. (notice BnF no FRBNF31840253, ) Édition tirée à 150 exemplaires.
  • Abel Bonnard (ill. Paul Baudier et Fernand Siméon), Supplément à De l'amour de Stendhal, Paris, Le Trianon, coll. « Suppléments à quelques œuvres célèbres », 1928, 131 p. (notice BnF no FRBNF31840254) Supplément à De l'amour, essai de Stendhal.
  • Abel Bonnard, Océan et Brésil, Paris, Flammarion, coll. « La Rose des vents », 1929, 248 p. (notice BnF no FRBNF31840244)
  • Abel Bonnard, Saint François d’Assise, Paris, Flammarion, 1929 (réimpr. 1934, 1943, 1992, 2005), 249 p. (notice BnF no FRBNF31840249)
  • Abel Bonnard, Rome, Paris, Hachette, coll. « Capitales du monde », 1931, 99 p. (notice BnF no FRBNF31840247)
  • Abel Bonnard, Claude Farrère, Maurice Guierre, Jean Painlevé, André Savignon et Roger Vercel, La Mer, Dieppe, Laboratoires « La Biomarine », 1934, 16 p., « Petits miroirs de la mer »
  • Abel Bonnard, Colette, Abel Hermant et Paul Morand (ill. Hermine David, Jean Berque, Henri Deluermoz et André Dignimont), Affaires de cœur, Paris, Nativelle, 1934, 91 p. (notice BnF no FRBNF32464278), « Le cœur sentimental »
  • Abel Bonnard, Jacques des Gachons et Émile Gérard-Gailly (ill. Jean Veber), Varia, Paris, Le Divan, coll. « Le souvenir de René Boylesve », 1936, 181 p. (notice BnF no FRBNF32158396)
  • Abel Bonnard, Les Modérés : le drame du présent, Paris, Grasset, 1936 (réimpr. 1986, 1993, 2013), 330 p. (notice BnF no FRBNF34811509)
  • Abel Bonnard et Georges Petit (ill. Paul-André Robert), Les Merveilles de la mer : le monde des poissons, t. 2, Paris, Laupen-Berne, coll. « Iris », 1937, 11 p. (notice BnF no FRBNF32522504) Publication en deux tomes, le premier étant l'œuvre de Paul Valéry.
  • Abel Bonnard, Savoir aimer, Paris, Albin Michel, coll. « Les Savoirs du temps présent », 1937 (réimpr. 1944), 191 p. (notice BnF no FRBNF31840252)
  • Abel Bonnard (ill. Pierre Labrouche), Navarre et Vieille-Castille, Paris, Creuzevault, 1937, 125 p.  Édition tirée à 160 exemplaires. On ne trouve pas trace d'une notice dans le catalogue général de la BNF.
  • Abel Bonnard, Les Bêtes, nos amies..., Paris, Flammarion, coll. « La Collection à 1 franc 95 », 1937, 48 p. (notice BnF no FRBNF31840252) Comprend des poèmes extraits des Familiers.
  • Abel Bonnard, Le Bouquet du monde, Paris, Grasset, 1938, 355 p. (notice BnF no FRBNF31840217) Contient « Rome », « La côte Dalmate », « Athènes », « Constantinople (1923) », « En Chine (1920) », « Andalousie (1924) » et « Au Brésil ».
  • Abel Bonnard, L’Amour et l’Amitié, Paris, Grasset, 1939, 287 p. (notice BnF no FRBNF31840213) Comprend L'Amitié et Savoir aimer.
  • Abel Bonnard, Pensées dans l’action, Paris, Grasset, 1941, 128 p. (notice BnF no FRBNF34189983) Comprend des articles — « En écoutant la voix anglaise », « Nos défauts et nous », « Morale d'une défaite », « Le maréchal Pétain chef de l'État », « L'instant décisif », « Franchise ou « habileté » ? » et « Des jeunes gens ou une jeunesse ? » — parus entre le 22 août et le 28 novembre 1940.
  • Abel Bonnard, Des jeunes gens ou une jeunesse ?, Paris, L'Artisan du livre, 1941 (réimpr. 1943), 30 p. (notice BnF no FRBNF31840240) Comprend l'article éponyme.
  • Abel Bonnard, Discours aux chefs miliciens prononcé le 30 janvier 1943, Paris, Plon, 1943, 23 p. (notice BnF no FRBNF31840227)
  • Abel Bonnard, Benjamín Palencia, Madrid, Palma, coll. « Pintores de España », 1948, 28 p.
  • Abel Bonnard (ill. Hubert Clerget), Le Prince de Ligne, Liège, Dynamo, coll. « La toison d'or », 1965, 19 p. (notice BnF no FRBNF36959568) Édition tirée à 111 exemplaires.
  • Abel Bonnard, Le Comte de Gobineau, Liège, Dynamo, coll. « Brimborions », 1968, 10 p. (notice BnF no FRBNF35785579, ) Texte repris d'un article intitulé « Un grand amateur » et paru dans Le Gaulois, no 16 148, du 20 décembre 1921.

Publications posthumes

  • Abel Bonnard (préf. Olivier Mathieu), Berlin, Hitler et moi : inédits politiques, Paris, Avalon, coll. « Histoire », 1987, 280 p. (notice BnF no FRBNF34972347) Comprend Pensées dans l'action et le Discours aux chefs miliciens, ainsi que des inédits : Berlin en mai, Notes sur Hitler et La Question juive. Édition d'Olivier Mathieu.
  • Abel Bonnard (note préliminaire d'Alain-Valery Aelberts et Jean-Jacques Auquier), Ce monde et moi, Haut-le-Wastia, Dismas, 1992 (réimpr. 2012), 220 p. Recueil d’aphorismes et de fragments d'Abel Bonnard rassemblés par Luc Gendrillon.
  • Abel Bonnard (av.-pr. Jean Mabire), Écrits politiques, Coulommiers, Déterna, coll. « Documents pour l'Histoire », 2008, 200 p. Réédition des textes politiques d'Abel Bonnard parus dans Berlin, Hitler et moi.

Publié dans Ecrivains

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